Écrit par Delia Oltean –
Le bateau s’apprête tout juste à partir pour un long voyage… De la France jusqu’au Nouveau Monde, le trajet peut prendre jusqu’à quelques mois. À bord, en plus de l’équipage, se trouve une denrée essentielle, l’alcool. Des tonneaux de vin vont faire le même long voyage que l’équipage dans le but de satisfaire la soif des habitants de la Nouvelle-France.
Dans la cave de la Maison Hurtubise ont été retrouvés quatre barils de vin et de porto ainsi qu’un support pour bouteilles de vin. Bien qu’il soit probablement impossible de savoir avec certitude l’usage que la famille en a fait ou même la provenance de tous ces articles relatifs à l’alcool, il n’empêche que la curiosité relative concernant la place de l’alcool dans la colonie de la Nouvelle-France est piquée.
L’histoire remonte jusqu’à Samuel de Champlain… Déjà à cette époque, les Français avaient eu l’idée d’importer de la vigne européenne (Lafrance, 1992). Quelques tentatives pour faire du vin avaient déjà été tentées avec les vignes sauvages de Nouvelle-France, seulement le vin était noir et très amer le rendant complètement imbuvable. Les vignes importées ont aussi été un échec, puisque le vin restait toujours amer. Les colons ont dû se rendre à l’évidence : importer du vin de la France était la meilleure solution au problème de cet alcool imbuvable (Allaire, 2009).
Si pour certains, la consommation du vin était fréquente à l’époque (Allaire, 2009), d’autres sont d’avis contraire (Ferland, 2004). Cette dualité s’explique dans les statistiques trouvées par les inventaires des commerçants de l’époque. Il semble même que « certaines années, les quantités d’alcool importées sont si importantes que ce type de marchandise constitue le premier revenu en taxes au port de Québec » (Ferland, 2004). Toutefois, l’importation du vin est comparable à un art tellement il faut calculer pour ne pas que le vin s’altère et s’imprègne d’amertume durant le transport. Malgré le débat, il semble qu’un autre alcool tel que la bière ait aussi été très populaire auprès de la population (Allaire, 2009).
Avec de nombreuses attaques de corsaires dans le golfe du Saint-Laurent ainsi que la guerre de Sept Ans, l’alcool prend plus de temps à être acheminé auprès de la population. Il arrivait même parfois que les bateaux ne viennent jamais ! Les prix gonflent et la manière de résoudre ce problème est de se tourner vers une autre source d’alcool qui peut être produit directement en Nouvelle-France. Les pommiers poussent facilement sur les terres (d’ailleurs la famille Hurtubise s’est aussi déjà lancée dans la culture des pommes et possédait un pressoir) (Stewart, Robichaud, 2001, p.54), alors pourquoi ne pas faire du cidre (Ferland, 2004) ?
Lentement, la production de cidre et de bière va prendre le dessus en Nouvelle-France (bien que certains styles de vins comme le porto vont être importés plus facilement sous le régime anglais) (Lafrance, 1992).
Références :
- Allaire, B. (2009). Le vin en Nouvelle-France. Vin Québec. https://vinquebec.com/node/6289
- Ferland, C. (2004). L’ivresse de découvrir. Au fil des événements. https://archives.nouvelles.ulaval.ca/Au.fil.des.evenements/2004/01.15/ferland.html
- Lafrance, M. (1992). De la qualité des vins en Nouvelle-France. Cap-aux-Diamants. https://www.erudit.org/fr/revues/cd/1992-n28-cd1039702/7981ac.pdf
- Stewart, A. Robichaud, L. (2001). Étude patrimoniale de la maison des Hurtubise. Institut d’histoire de l’Amérique française et Ministère de la Culture et des Communications.