Comment était la vie d’une jeune fille au début du XXe siècle ?
Suzanne Hurtubise, parfois surnommé Suzette dans nos archives, était la fille de Flavien Hurtubise et Alice Rodier. Flavien étant le seul frère Hurtubise de sa génération à avoir des enfants, ses filles, Suzanne et Claire, étaient de fait les seules nièces de Dr Leopold.
Suzanne apparaît dans plusieurs photos prises par Dr Leopold, affiché dans la Maison Hurtubise pendant les visites guidées. Elle a peut-être habité dans la Maison Hurtubise avec ses parents et sa sœur pour un temps ou bien elle a souvent visité la maison pendant les vacances d’été. Pendant longtemps, nous ne savions seulement que la petite fille dans ces photos était nommée Suzanne. L’hypothèse était qu’elle était une nièce de Léopold, mais nous n’étions pas en mesure de confirmer ce fait. Cependant, un visiteur nous a informé qu’il existait des photos de Suzanne dans une salle qui existe encore dans l’école Villa Maria, ce qui nous as permis d’approfondir nos recherches.
Le fait que Suzanne ait fréquenté l’école Villa Maria nous donne un indice sur son éducation. Nous avons trouvé des factures datent de 1906 à 1913 et ceci nous aide à comprendre l’éducation qu’elle a reçue. Il avait des pensionnaires et des étudiants de jour au niveau primaire, mais toutes les élèves du secondaire devaient être pensionnaires. Au début du XXe siècle, Villa Maria avait entre 170 et 200 élèves. Parmi ce nombre, plusieurs enfants venaient des États-Unis et y restaient sauf pour les vacances de noël et d’été.
On peut émettre l’hypothése qu’une école catholique privée pour filles se serait concentrée uniquement sur les études religieuses et sur l’apprentissage “féminin” comme la couture et l’art. La religion jouait effectivement un grand rôle dans l’école — les étudiantes assistaient chaque année aux fêtes religieuses de l’Église, par exemple — mais il y avait aussi toute une série d’autres activités enseignées : Ils étudiaient des matières telles que l’astronomie, l’histoire et la littérature. Des professeurs de l’Université Loyola et de Laval étaient aussi invités pour enrichir les cours des filles. Elles faisaient aussi parfois des sorties — une fois, les étudiants sont invités à Loyola pour assister à des tests de radiographies. Il y avait également du temps pour des activités théâtrales parascolaires. Par exemple, les étudiantes mettaient en scène des pièces de Shakespeare. Après avoir quitté Villa Maria, les jeunes filles avaient probablement l’une des éducations les plus complètes disponibles à l’époque à Montréal.1
Même après cette découverte, nous n’avions aucune trace de Suzanne après ses études hormis les quelques lettres qui lui sont adressées dans nos archives. Nous ne savions même pas avec certitude si les lettres que nous avons trouvées étaient pour la même Suzanne. Grâce à des recherches plus approfondies dans les archives des journaux, nous avons pu retrouver son avis de mariage. En 1920, elle épouse un Anglais de Londres, C. Vivian Pullen. Son mariage nous permet surtout de comprendre que les Hurtubise, malgré qu’ils étaient d’origine française, se trouvaient dans les mêmes cercles sociaux que les Anglophones.
Suzanne a certainement beaucoup voyagé. Elle aurait visité l’Europe avec son mari et plus tard avec sa sœur pendant de longues périodes. Nous savons également qu’elle aurait visité ou vécu à New York grâce à des lettres adressées à “Mme Pullen” à New York.
Il semblerait que Suzanne Hurtubise et son époux C. Vivian Pullen ont jamais eu d’enfants. Nous n’avons pas pu trouver le prénom de ce dernier ni les traces de sa vie à Montréal, mais nous avons trouvé l’avis de décès de Suzanne. Elle est décédée à Montréal en 1984. Elle avait quatre-vingt-huit ans, plaçant sa date de naissance en 1896. Elle aurait vu l’urbanisation de Westmount de ses propres yeux, elle aurait gagné le droit du vote fédéral avec toutes les femmes du Canada en 1919 pendant la première guerre mondiale, et elle aurait eu le droit provincial du vote au Québec en 1940 pendant la deuxième guerre mondiale. Elle aurait vécu l’Expo 67 et aurait vu les Olympiques de Montréal en ‘76. En 1984, elle laisse dans le deuil deux nièces, filles de Claire, et deux cousines du côté maternel de la famille.
Suzanne a été inhumée au cimetière Notre-Dame-des-Neiges après une vie riche et longue. C’est au travers des photos de Dr. Leopold exposées à la Maison Hurtubise que nous pouvons aujourd’hui se rappeler de son enfance et s’imaginer sa vie.
- Helen Lanthier, “Monklands Then, Villa Maria Now.” Congrégation of Notre Dame, p. 38–40.
“Annales de Villa Maria,” Archives de la Congrégation de Notre Dame. ↩︎