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Socialisation et accessibilité : La mode de la classe moyenne à Montréal durant les années 1900

20 Août 24
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Écrit par Ines Marchand

Au début du 20e siècle, l’Occident, après l’ère victorienne, entra dans l’ère edwardienne sous le règne d’Edward VII. Cette période, marquant une transformation majeure dans la culture, se distingua par une nouvelle sophistication et nouveau mode de vie, reflétant les changements sociaux et culturels de l’époque. La famille Hurtubise, résidant à Montréal durant cette période, fut témoin de ces changements, notamment à travers leur propre mode vestimentaire. Aujourd’hui, c’est en analysant les photos prises de la famille entre 1900 et 1905 que les tendances de l’époque nous permettent de situer socialement la famille au sein de cette époque effervescente.

Avant tout, il est nécessaire de décrire la mode de l’époque. La mode edwardienne, qui couvre la fin du 19e et début du 20 siècle, apporta des changements significatifs dans le style vestimentaire occidental. Montréal, alors en plein essor culturel, se positionnait comme un centre de mode au Canada avec ses rues commerçantes telles que Saint-Paul, Saint-James, Notre-Dame, et Sainte Catherine devenant des pôles de magasins alimentées par les manufactures locales naissantes.

Pour les femmes, la mode de l’époque se caractérisait par la silhouette en S. Alors que les femmes entraient de plus en plus dans le monde du travail, la silhouette victorienne fit place à cette nouvelle forme plus pratique. Afin d’acquérir cette silhouette, des sous-vêtements méticuleusement conçus étaient superposés sur le corps. Une chemise venait tout d’abord être portée ainsi qu’avec des culottes. Les corsets, souvent sur-mesure, venaient ensuite créer la silhouette en accentuant la taille et les hanches. Contrairement à la croyance populaire, ces corsets n’étaient ni inconfortables ni contraignants; ils offraient un soutient semblable à celui des sous-vêtements modernes tout en favorisant une posture élégante. Par-dessus le corset était mit un cache corset. Celui-ci affinait également la taille en mettant en valeur la poitrine, tandis que les jupons, avec leur effet de traine, continuant cette forme en S en dessous de la taille. Enfin, par-dessus était déposés les vêtements portés.

Les vêtements de jours fréquemment portés étaient soit des haut à manches longues, plus ou moins léger en fonction des saisons, accompagnées de jupes, soit des robes à formes similaires. Certains détails accompagnant la silhouette étaient les manches bouffantes, qui apparurent au début du 20e siècle, qui s’accentuèrent de plus en plus au fil des années. Les jupes avec boutons, qui se faisaient fréquentes également, se transformaient souvent en pantalons si besoin lors d’activités sportives. La mode edwardienne, bien qu’esthétique, marqua une évolution vers une monde toujours plus fonctionnelle pour les femmes.

Les vêtements tailleur pour femmes émergèrent également comme une tendance marquante, s’inspirant de vêtements masculins tels que le tailleur et les chemises à boutons. Les robes de soirées, quand à elles, conservaient cette silhouette en S, mais étaient généralement sans manches et présentaient des décolletés plus prononcés, reflétant une mode moins modeste que celle de jour.

Les accessoires de l’époque apportaient une touche de sophistication aux vêtements de tous les jours. Les chapeaux, soit canotiers ou ornées de plumes, se fixaient avec des épingles à chapeaux. Les chaussures en cuir à talons, inspirées de celles au style Louis XIV, présentaient des talons courbés et de nombreux boutons.

La mode masculine, bien que moins révolutionnaire, vit des ajustements notables. Les costumes trois pièces, populaire depuis le siècle précèdent, subirent peu de modifications. Les manteaux longs, appelés manteaux en « queue de pie, » se transformèrent en veste plus courtes et moins formelles. Les vestons, chemises, vestes et chapeaux (canotiers ou melon) pouvaient tous être retirés en fonction du degré de formalité requis. Les cols de chemises de l’époque, nommés « cols Impériaux, » étaient droit et formel, et pouvaient également être retirés.

Les photos de la famille Hurtubise illustrent encore aujourd’hui cette apparition de la mode edwardienne. Étant de classe moyenne et intéressée par les arts, la famille Hurtubise suivait et participait à la mode à travers leurs propres vêtements. Les photos nous permettent d’analyser et de comprendre comment les Hurtubise de la dernière génération restaient en accord avec la mode durant une époque riche en mode et changement à Montréal.  

Photo 1

Dans cette première image, le costume trois pièces porté par les hommes de la famille reflète les tendances de l’époque. Nous pouvons observer les vestons, les chemises et cols impériaux. D’un homme à l’autre, nous pouvons voir les différentes manières d’accoutré le costume en fonction des besoins et désires. La sobriété et couleurs sombres du costume mettent en valeur la mode de l’époque concernant le costume.

Photo 2

Cette deuxième photo met en lumière les différences générationnelles dans le costume et permet d’illustrer ce changement dans la forme de la veste. À gauche, nous pouvons retrouver un costume typiquement edwardien, avec la veste courte et le col impérial, tandis qu’à droite, nous retrouvons le veston et la montre qui y est accrochée accompagnés du manteau en queue de pie, typique du 19e siècle. Tandis que le plus jeune à gauche porte un chapeau canotier, l’homme plus âgé à droite porte un chapeau haut de forme, également typique du siècle précédent.

La femme présente sur la photo porte une jupe et blouse semblant imité le costume trois pièces tout en restant féminin, ainsi qu’un chapeau melon, originellement porté par les hommes. Sa ceinture est décorée, et elle semble porter un collier qui pourrait être une montre, sachant que les montres au poignet ne sont devenues populaires que bien plus tard durant le 20e siècle.  

Photo 3

L’élégance de la famille se démontre également à travers les vêtements protées par les femmes dans cette photo, notamment à travers les coutures et boutons des fermetures ne sont pas visibles. Cela permet une illusion de longueur dans la silhouette et qualité des vêtements. Pour la femme assise au milieu, les coutures se trouvent potentiellement sur son coté, tandis que les deux autres femmes autour d’elle ont surement les boutons de leur robe à l’arrière de celles-ci. Les bustes sont aussi accentués et les manches bouffantes bien présentes.

Les détails se trouvent dans les accessoires tel que les chapeaux hauts ornés de plumes ou sur certaines parties des robes. Les cheveux, quant à eux, sont coiffés haut sur la tête en chignon, mais moins serrées qu’au siècle dernier. Ces détails soulignent l’engagement vers l’esthétique épuré et sophistiqué de la mode edwardienne.

La fillette sur la photo, habillée comme une adulte mais avec les cheveux détachés, des vêtements clairs et une robe relativement courte, démontre une mode edwardienne également présente chez les enfants. Cet esthétique, évoluant en fonction de l’âge, permet de connaitre la tranche d’âge de l’enfant.

Photo 4

Toutes ces tendances et détails se trouvent dans cette dernière photo; les manches bouffantes, le costumes trois pièces, les détails brodés sur les vêtements, les hauts légers et légèrement masculins accompagnés de jupes longues, les bottes à boutons, et les cheveux haut coiffés. Les deux jeunes filles portent également des robes plus claires mais plus longues, leurs cheveux mieux coiffés, démontrant une tranche d’âge plus avancée.

Cependant, les vêtements portés par la famille Hurtubise ne reflètent pas seulement leur souci de style, mais aussi leur statut social. Les choix vestimentaires, tels que les coutures cachées et chapeaux ornés, ainsi que la mise en scène photographique, témoignent d’un investissement dans la mode et une volonté de maintenir une certaine apparence. La famille Hurtubise, bien que de classe moyenne, parvenant à allier esthétique et fonctionnalité, ainsi qu’achat et fait-main, tout en reflétant les tendances de l’époque.

En effet, des détails sur les photos montrent un statut social et des moyens financiers relativement élevés. Dans notre première photo, l’élégance raffiné des couleurs et des détails dans les vêtements suggère un pouvoir d’achat et mode de vie qui permettait de porter des vêtements clairs. Les vêtements blancs ou crème `étaient un signe de statut social, leur entretient nécessitant de ne pas effectuer des travaux physiques et donc de ne pas les tacher, une indication de travaux non physiques mais intellectuels chez les membres de la famille Hurtubise, une indication de leur statut social élevé.

La deuxième photo illustre l’effort de la famille pour rester en accord avec la mode de l’époque, avec la femme portant un semblant de tailleur masculin, une coupe fréquente chez la mode féminine.

Dans notre troisième photo, les coutures et boutons cachés des vêtements révèlent un savoir-faire couteux. Bien que celles-ci ne soient pas au summum de la tendance, ce souci du détail démontre tout de même un désir de suivre la mode edwardienne de l’époque. Les chapeaux portés viennent accentuer ce désir.

Finalement, notre dernière photo démontre le désir de la famille de rester en tendance au fil des saisons. Les vêtements vus sont en effet conçus pour être à la fois élégants et adaptés aux saisons. On y observe toujours les manches bouffantes, les bottes de cuir, les cheveux attachés, les vêtements claires pour les filles plus jeunes, et des hauts et chemises clairs décorés de dentelles. Cette adaptation reflète une attention particulière porté à l’image et une certaine habilité à acquérir l’image désirée.

D’autres détails, en revanche, démontrent notre théorie de détails fait main sur les vêtements des Hurtubise. Par exemple, dans première deuxième photo, la fillette porte une robe avec un col en dentelle et des manches ornées de broderie anglaise. La broderie, moins fine que la dentelle, indique une modification faite par la famille afin d’ajouter une touche de distinction. Cela montre un besoin de personnalisation, les vêtements pouvant être achetés comme tel surement trop chers pour la famille.

Ainsi, les vêtements de la famille Hurtubise révèlent donc non seulement leur souci du style, avec leur apparence soignée et élégante, mais aussi leur capacité financières et une envie de faire partie de la haute société malgré tout. La famille, malgré leur appréciation des arts, demeurait de classe moyenne. Il est donc probable, comme vu précédemment, qu’ils combinaient des vêtements faits-main ainsi que achetés, optant pour la modification d’articles de qualité afin d’obtenir l’effet désiré. Étant des membres actifs de la société, il est possible de spéculer que les Hurtubise fréquentaient les magasins de mode des rues marchantes telles que Saint Paul, Sainte Catherine, Saint James et Notre Dame. Les Hurtubise se procurait surement leur lin et coton à Dick John ou Canadian Colored Cotton Mills & CO sur la rue Saint James, leurs corsets à Barry Bros et Compton Corsets sur Notre Dame et Grenier C.J sur Sainte Catherine, leurs bijoux à Eaves Alfred sur Notre Dameet Eaves Eamund sur Saint James, et enfin leurs chaussures à Real LTD sur Notre Dame. Ils devaient aussi probablement fréquenter les tailleurs LaMontagne et Morgan & Henry sur Sainte Catherine.

En conclusion, l’analyse des vêtements et des photos de la famille Hurtubise nous offre donc un aperçu de leur statut social et de leur mode de vie, ainsi que celui de n’importe quelle famille de même classe social à cette époque. À travers les détails de leur habillement, allant des coutures aux chapeaux ornés, il est clair que la famille, bien que de classe moyenne, cherchait à refléter une image sophistiquée et élégante. Ainsi, leurs vêtements révèlent non seulement un désir de participer à la haute société malgré les limitations, offrant un éclairage sur leur place dans la société montréalaise de l’époque, mais également une affinité pour les arts, une démonstration de capacité de s’exprimer à travers le mélange de la photographie et de la mode, une narration subtile mais fascinante se révélant au travers des photos du Docteur Hurtubise.

Réferences:

Toutes les photos de vêtements, en dehors de celles de la Maison Hurtubise, proviennent des archives du Musée McCord Stewart, situé à Montréal.

Franklin, Harper. “1890-1899”. Fashion History Timeline, Last updated Aug 18, 2020. https://fashionhistory.fitnyc.edu/1890-1899/

Reddy, Karina. “1900-1909”. Fashion History Timeline, Last updated Aug 18, 2020. https://fashionhistory.fitnyc.edu/1900-1909/

Laver, James. “Costume and Fashion: A concise History”. Thames and Hudson, 2014.

Milford-Cottam, Daniel. “Edwardian Fashion”. Shire Publications, 2016.

Archibald, Kristy. “Montreal’s Garnment District Past and Present”. Nuvo Magazine, 2021. https://nuvomagazine.com/daily-edit/montreals-garment-district-past-and-present

BAnQ Numérique. « Collection d’annuaires Lovell de Montréal et sa région, 1842-2010 ». Consulte dernièrement aout 2024.

Une vie riche et longue: qui était Suzanne Hurtubise?

08 Août 24
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Comment était la vie d’une jeune fille au début du XXe siècle ?  

Suzanne Hurtubise, parfois surnommé Suzette dans nos archives, était la fille de Flavien Hurtubise et Alice Rodier. Flavien étant le seul frère Hurtubise de sa génération à avoir des enfants, ses filles, Suzanne et Claire, étaient de fait les seules nièces de Dr Leopold.  

Suzanne apparaît dans plusieurs photos prises par Dr Leopold, affiché dans la Maison Hurtubise pendant les visites guidées. Elle a peut-être habité dans la Maison Hurtubise avec ses parents et sa sœur pour un temps ou bien elle a souvent visité la maison pendant les vacances d’été. Pendant longtemps, nous ne savions seulement que la petite fille dans ces photos était nommée Suzanne.  L’hypothèse était qu’elle était une nièce de Léopold, mais nous n’étions pas en mesure de confirmer ce fait. Cependant, un visiteur nous a informé qu’il existait des photos de Suzanne dans une salle qui existe encore dans l’école Villa Maria, ce qui nous as permis d’approfondir nos recherches.  

Collection de la Maison Hurtubise, «FLV avec Suzette à cheval.»
Collection de la Maison Hurtubise, «Suzanne au salon.»
Collections de la Maison Hurtubise, «Groupe au Couvent 1ere communion de Suzette.»
Archives de la Congrégation de Notre-Dame, les Annales de Villa Maria. Nous pouvons voir le nom de Suzanne Hurtubise dans la colonne de «Mlles» qui font leur communion. Ceci apparaît dans les annales en date d’avril 1907.

Le fait que Suzanne ait fréquenté l’école Villa Maria nous donne un indice sur son éducation. Nous avons trouvé des factures datent de 1906 à 1913 et ceci nous aide à comprendre l’éducation qu’elle a reçue. Il avait des pensionnaires et des étudiants de jour au niveau primaire, mais toutes les élèves du secondaire devaient être pensionnaires. Au début du XXe siècle, Villa Maria avait entre 170 et 200 élèves. Parmi ce nombre, plusieurs enfants venaient des États-Unis et y restaient sauf pour les vacances de noël et d’été.

Archives de la Congrégation de Notre-Dame, fichier 326.000.056. Nous pouvons constater que sur la 3e ligne, en rang de 37, il est écrit: S. Hurtubise, Flavien, 563 Côte St. Antoine, Montréal.
Archives de la Congrégation de Notre-Dame, fichier 326.000.057. Nous pouvons constater qu’il s’agit d’une facture pour «Mlles. Suzanne et Claire Hurtubise.»

On peut émettre l’hypothése qu’une école catholique privée pour filles se serait concentrée uniquement sur les études religieuses et sur l’apprentissage “féminin” comme la couture et l’art. La religion jouait effectivement un grand rôle dans l’école — les étudiantes assistaient chaque année aux fêtes religieuses de l’Église, par exemple — mais il y avait aussi toute une série d’autres activités enseignées : Ils étudiaient des matières telles que l’astronomie, l’histoire et la littérature. Des professeurs de l’Université Loyola et de Laval étaient aussi invités pour enrichir les cours des filles. Elles faisaient aussi parfois des sorties — une fois, les étudiants sont invités à Loyola pour assister à des tests de radiographies. Il y avait également du temps pour des activités théâtrales parascolaires. Par exemple, les étudiantes mettaient en scène des pièces de Shakespeare. Après avoir quitté Villa Maria, les jeunes filles avaient probablement l’une des éducations les plus complètes disponibles à l’époque à Montréal.1 

Archives de la Congrégation de Notre-Dame, un programme pour une «séance historique.»
Archives de la Congrégation de Notre-Dame, une lettre qui démontre que l’école Villa Maria avait dans sa possession une collection de roches et de minéraux qui servaient à l’apprentissage.

Même après cette découverte, nous n’avions aucune trace de Suzanne après ses études hormis les quelques lettres qui lui sont adressées dans nos archives. Nous ne savions même pas avec certitude si les lettres que nous avons trouvées étaient pour la même Suzanne. Grâce à des recherches plus approfondies dans les archives des journaux, nous avons pu retrouver son avis de mariage. En 1920, elle épouse un Anglais de Londres, C. Vivian Pullen. Son mariage nous permet surtout de comprendre que les Hurtubise, malgré qu’ils étaient d’origine française, se trouvaient dans les mêmes cercles sociaux que les Anglophones.  

L’avis de mariage entre Suzanne Hurtubise et C. Vivian Pullen. Il apparaît dans «La Patrie,» le 11 juin 1920.

Suzanne a certainement beaucoup voyagé. Elle aurait visité l’Europe avec son mari et plus tard avec sa sœur pendant de longues périodes. Nous savons également qu’elle aurait visité ou vécu à New York grâce à des lettres adressées à “Mme Pullen” à New York. 

Il semblerait que Suzanne Hurtubise et son époux C. Vivian Pullen ont jamais eu d’enfants. Nous n’avons pas pu trouver le prénom de ce dernier ni les traces de sa vie à Montréal, mais nous avons trouvé l’avis de décès de Suzanne. Elle est décédée à Montréal en 1984. Elle avait quatre-vingt-huit ans, plaçant sa date de naissance en 1896. Elle aurait vu l’urbanisation de Westmount de ses propres yeux, elle aurait gagné le droit du vote fédéral avec toutes les femmes du Canada en 1919 pendant la première guerre mondiale, et elle aurait eu le droit provincial du vote au Québec en 1940 pendant la deuxième guerre mondiale. Elle aurait vécu l’Expo 67 et aurait vu les Olympiques de Montréal en ‘76. En 1984, elle laisse dans le deuil deux nièces, filles de Claire, et deux cousines du côté maternel de la famille.  

L’avis de décès de Suzanne Hurtubise (Pullen). Retrouvé dans le Gazette de Montréal, 13 Octobre, 1984.

Suzanne a été inhumée au cimetière Notre-Dame-des-Neiges après une vie riche et longue. C’est au travers des photos de Dr. Leopold exposées à la Maison Hurtubise que nous pouvons aujourd’hui se rappeler de son enfance et s’imaginer sa vie.  

  1. Helen Lanthier, “Monklands Then, Villa Maria Now.” Congrégation of Notre Dame, p. 38–40. 
    “Annales de Villa Maria,” Archives de la Congrégation de Notre Dame.  ↩︎

Influence coloniale et historique : l’évolution agricole de la Famille Hurtubise

01 Août 24
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Écrit par Inès Marchand

En 1699, en Nouvelle France, Louis Hurtubise acquit des terres afin de les cultiver et transformer sa famille en une famille de fermiers. Depuis, les Hurtubise ont prospéré, leur richesse surpassant celle des familles voisines et autres agriculteurs dans la région à l’époque. Cette prospérité est encore visible aujourd’hui à travers l’architecture et composition de la Maison Hurtubise de Westmount. L’agriculture de la famille Hurtubise aura évoluée au fil du temps, traversant différentes phases correspondant aux différentes phases agricoles observées au Québec entre 1600 et 1910.

Au début des années 1600, avec l’arrivée massive des colons français, l’agriculture devint leur principale occupation, à l’exemple de Louis Hébert, premier colon agriculteur en Nouvelle France. Les principales céréales cultivées étaient le maïs, le blé, les pois et autres céréales diverses. Tout au long du siècle, l’agriculture et la colonisation furent encouragées. Jean Talon introduisit également la culture du chanvre ainsi que l’élevage de bétail en Nouvelle-France.  

Les Hurtubise, faisant parti de ce flux, se tournèrent vers cette pratique. De 1699 à 1800, ils cultivaient de l’avoine, des pois, blé et orge. Ils possédaient également des animaux, bien que ceux-ci consistaient à des fins purement domestiques. Ils possédaient neuf porcs, quatre chevaux, onze vaches et trois taureaux, et c’est avec leur culture d’avoine qu’ils parvenaient à les nourrir. Leur terrain cultivable était de 3 par 29 arpents (un arpent équivalent à 192 pieds), et leur production comprenait 38 minots de blé, 42 minots d’avoine, 15 minots de pois et un arpent de tabac à usage personnel à partir de 1798. Durant cette époque, les principaux cultivateurs furent Louis Hurtubise (1699-1703), Jean Hurtubise (1724-1766) et enfin Pierre-Jérémie Hurtubise (1766-1792). Comme dans toutes les familles fermières québécoises, la succession des terres se faisait de père en fils. Grâce à l’emplacement de leurs terres en montagne, l’eau descendait et traversaient leurs terres naturellement, favorisant des conditions idéales et minimisant les pertes de récoltes.  

Après 1793, les colons anglophones s’installèrent à leur tour autour de la Nouvelle France, introduisant ainsi la culture de la pomme de terre. Malgré cela, l’agriculture resta la principale activité des colons francophones. 

Au début du 19e siècle, le Québec fit face à des difficultés agricoles, une période surnommée La crise agricole du 19e siècle. Selon les thèses historiques, cette crise fut causée par une baisse de la production de blé en Bas-Canada, permettant au Haut-Canada de prospérer dans ce domaine. Les colons français, principalement issus de milieux ruraux, manquaient de connaissances en techniques agricoles modernes, ce qui entraina une baisse de la production et un appauvrissement dramatique des paysans, qui se tournèrent vers l’agriculture de subsistances.  

C’est à cette époque que l’on observe le premier changement dans l’agriculture des Hurtubise ; l’incorporation d’agriculture maraîchère. Selon des relevés de 1861, la surface cultivable comprenait alors 32 arpents de culture de champs, 8 arpents pour le pâturage, 3 arpents pour le verger et 2 arpents boisés, soit 45 arpents au total. Leur production, quand a-t-elle, était de 30 minots de blé, 30 minots d’orge, 25 minots de pois, 100 d’avoine, 600 minots de pomme de terre, 100 minots de carotte, 3 tonnes de foin et 300 minots de beurre. Les Hurtubise possédaient toujours des animaux : six vaches, dont trois vaches à lait, cinq chevaux et quatre porcs. Les cultivateurs à cette époque furent Pierre-Jérémie fils Hurtubise (1798-1829) et Antoine-Isaïe Hurtubise (1829-1878).  

Ces changements, survenus pendant cette crise agricole au Québec, suggèrent que malgré la fertilité et le bon emplacement de leurs terres, les Hurtubise ont dû s’adapter. L’incorporation de nouvelles cultures, bien que non-nécessaire dans leur cas, prévoyait un besoin de subsistance en raison du déclin économique au Québec. Il n’existe malgré tout aucune trace dans nos archives aujourd’hui d’un déclin de richesse chez les Hurtubise durant cette période, suggérant qu’ils furent chanceux comparé au reste du Québec.  

Bien que nous n’ayons pas de traces précises du quotidien de la famille à cette époque, nous pouvons tout de même imaginer une journée typique à la Maison Hurtubise. La journée commençait tôt, les hommes s’occupant des vaches à traire et des œufs des poules. La matinée était consacrée aux cultures maraichères, avec l’entretien et la récolte des fruits et légumes. Le reste de la journée était dédiée aux champs, où il fallait planter, semer et récolter les cultures céréalières. Pendant ce temps-là, les femmes et les enfants restaient ensemble dans la pièce principale de la maison, préparant des repas copieux afin de nourrir toute la famille, tout particulièrement les hommes qui nécessitait énormément énergie. 

La crise agricole, due au déclin du blé, obligea de nombreuses familles fermières à changer leurs pratiques. Bien que l’agriculture fût toujours présente au Québec, celle-ci n’était plus aussi prospère que dans le reste du Canada. Vers la fin des années 1800, le Bas-Canada, ou Québec, se tourna vers l’industrie laitière afin de subvenir à ses besoins. 

À cette époque, la sixième et dernière génération Hurtubise habite Westmount. Cette génération abandonna complétement l’agriculture afin de se tourner vers des études, comme le docteur Léopold Hurtubise, dernier propriétaire de la maison. Des relevés de 1873 montrent que, après la vente de 9,4 hectares par Antoine-Isaïe, les 7,1 hectares restants furent utilisés afin de cultiver de la camomille, des concombres, du lierre, de la ciboulette, des pommes de terre, des poireaux, du navet, des oignons, du lin, des fraises, du thym, des radis, des capucines, des betteraves, des panais, de la moutarde, du maïs, des citrouilles et des pois. Les animaux restants étaient une vache, 24 poules, 3 canards et 4 chevaux utilisés pour les déplacements en calèche. Isaïe Hurtubise, fils d’Antoine Isaïe, fut le dernier cultivateur, de 1878 à 1893. Les récoltes restantes servaient à subvenir uniquement aux besoins de la famille et n’avait donc aucunes finalités financières.  

Aujourd’hui, seule la Maison Hurtubise et ses archives témoigne de l’existence de cette famille et de leur quotidien en tant que fermiers. Malgré tout, un jardin commémoratif fut construit sur place afin de retracer et représenter à plus petite échelle les anciennes terres de la famille Hurtubise.  

Références : 

Dick, L., & Taylor, J. (2024). Histoire de l’agriculture jusqu’à la Deuxième Guerre mondiale. Dans l’Encyclopédie Canadienne. Repéré à https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/histoire-de-lagriculture

Lavertue, R. (1984). L’histoire de l’agriculture québécoise au XIXe siècle : une schématisation des faits et des interprétations. Cahiers de géographie du Québec, 28(73-74), 275–287. https://doi.org/10.7202/021660ar

Une galerie anachronique?

09 Juil 24
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Par Julie Jacques

Une galerie de style Beaux-Arts sur une maison datant de 1739 peut sembler bizarre à première vue. À la Maison Hurtubise, cette galerie n’est pas un anachronisme mais plutôt un indice. Son histoire peut nous aider à mieux comprendre la famille qui a habité cette ancienne maison pendant six générations.  

La galerie ne date pas de la construction de la maison. Quand cette dernière est construite, il n’avait que des escaliers. L’absence de la galerie offrait un accès facile au sous-sol, qui était probablement utilisé pour stocker les récoltes pendant l’hiver. La porte d’accès au sous-sol en façade de la maison existe encore aujourd’hui, en-dessous de la galerie.  

Une peinture effectuer par P. Roy Wilson, architecte et artiste, qui imagine la maison sans sa galerie ni son extension de toit. Il est aussi possible de constater la porte qui mène au sous-sol dans la façade de la maison.

Comme on le sait, aucune maison historique est sans rénovation. Chaque génération d’Hurtubise a laissé sa propre trace sur la maison et le terrain qui leur appartenait. Pendant des restaurations fait par l’Héritage Canadien du Québec (HCQ), cinq couches distinctes de plancher ont été retrouvé. La maison n’a pas toujours eu une galerie, et nous ne savons pas exactement quand la galerie a été rajoutée. Ce serait entre la première et quatrième génération des Hurtubise, soit entre 1739 et 1878, en complément des travaux de prolongement du toit, qui couvre et protège désormais la galerie du soleil et de la neige. 

Cependant, l’ancien style de la galerie nous permet d’arriver à une approximation plus exacte. Ce style, vu dans des photos prises au début du 20e siècle, semble influencée par le style victorien. L’ancien style de la galerie, vu dans des photos prises au début du 20e siècle, serait peut-être influencée par le style victorien. La galerie, particulièrement les colonnes, porte des ressemblances a d’autre maison de style victorien et renaissance gothique situé autour de l’Amérique du Nord.1 Tout ça dit, la galerie est très simple comparé à d’autre qui sont réellement de style victorien ; la Maison Hurtubise reste une maison de ferme canadienne-française. 

Quand même, ceci nous permet de deviner que la galerie, au moins cette itération quasi-victorienne, aurait peut-être été construite pendant l’époque victorienne entre 1838 et 1870. (L’époque victorienne s’étend jusqu’en 1901 mais l’annexe en brique de la maison aurait été construite dans les années 1870. La construction de la galerie est probablement antérieur à celle de l’annexe.) 

Bien que nous ne puissions savoir exactement pourquoi la galerie aurait été rajoutée après la construction initiale de la maison, il est facile d’imaginer la famille Hurtubise profitant des précieuses journées d’été, tant attendu après un long hiver. Ils auraient été protégés du soleil par cette extension au toit, pendant qu’ils divertissaient des invités ou pendant qu’ils finissaient des tâches domestiques—je pense à ma grand-mère qui me dit que sa grand-mère faisait souvent de la couture assise dehors pendant l’été.  

 

Une photo prise par Dr. Léopold Hurtubise ou nous voyons son frère, Flavien, et une membre de la famille, Suzette, en devant de la galerie.
Une photo, prise par Dr. Léopold Hurtubise, de la Maison Hurtubise avant les rénovations datant de 1911 qui ont changé le style de la galerie.
Photo et description provenante du livre «Porches of North America» qui démontre une maison avec un style de poteau similaire à l’ancienne galerie de la Maison Hurtubise. Celle-ci est dites «gothique,» qui était une caractéristique de l’architecture victorienne d’après ce livre.

Dr. Leopold Hurtubise, le dernier Hurtubise ayant habité la maison, était le responsable pour la galerie style Beaux-Arts, datant de 1911. De cela, ainsi que des photos qu’il a prises avec son appareil photo pendant ces études, on peut deviner qu’il était un homme qui appréciait l’art. En tant que médecin et photographe amateur, nous voyons dans sa personnalité un mariage d’art et de science. Ses photos, démontrent une appréciation tant pour la galerie que pour l’extérieur et la nature qui entourait la Maison Hurtubise. 

N’hésitez pas à venir voir l’évolution de la galerie dans le cadre de notre exposition temporaire sur les photos du Docteur Hurtubise. Inclus dans la visite de la Maison Hurtubise https://hcq-chq.org/the-hurtubise-house/.

La galerie de style Beaux-Arts après les restorations fait par l’Héritage canadien du Québec en 2005 et en 2012.

  1.  Thomas Durant Visser. “Victorian Porch Styles,” Porches of North America. University Press of New England, 2012.  ↩︎

Le mythe du melon montréalais

19 Juin 24
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Écrit par Julie Jacques

Source: Archives de la Ville de Montréal. La photo démontre un déjeuner au Belvedere du Mont Royal, en 1919, avec Son Altesse Royale le Prince de Galles. On peut constater que du melon en tranche a été servi aux invités. . . Peut-être le fameux melon de Montréal?
Source: https://www.montrealbicycleclub.com/blue-bonnets.html
L’hippodrome «Blue Bonnet» de Montréal, qui aurait était construit près de l’actuel station de train Montréal-Ouest en 1872 et, après qu’il aurait été coupé en deux par une nouvelle voie ferrée en 1886, a été reconstruit sur le boulevard Décarie en 1907.
  1. Daphné Cameron, «Le mystère du melon de Montréal enfin résolu?» La Presse, 8 juin 2024.
    Tori Marlan, «This Melon Used to Sell for $24 a Slice. Should it Make a Comeback?» Buzzfeed News, 3 janvier 2016. ↩︎
  2. Daphné Cameron, «Le mystère du melon de Montréal enfin résolu?» La Presse, 8 juin 2024.
    Fabien Deglise, “Le melon de montréal ne fait plus le poids,” Le Devoir, 11 octobre 2006.
    Sophie Lachapelle, “Un melon mythique!” L’actualité.com, 22 avril 2013.
    Clémence Ménard, “Vers un possible retour du melon de Montréal?” Ville en vert, 1 septembre 2021. ↩︎
  3. Tori Marlan, « This Melon Used to Sell for $24 a Slice. Should it Make a Comeback? » Buzzfeed News, 3 janvier 2016. ↩︎
  4. Tori Marlan, « This Melon Used to Sell for $24 a Slice. Should it Make a Comeback? » Buzzfeed News, 3 janvier 2016. ↩︎
  5. Tori Marlan, « This Melon Used to Sell for $24 a Slice. Should it Make a Comeback? » Buzzfeed News, 3 January 2016. 
    « L’histoire du melon de montréal, » Quelle histoire!, accédé le 17 juin 2024.  ↩︎
  6. Alan M. Stewart et Léon Robichaud. « Étude patrimoniale de la maison des Hurtubise : Rapport présenté au Ministère de la Culture et des Communications et à l’Institut d’histoire de l’Amérique française, » mai 2001.  ↩︎
  7. Daphné Cameron, «Le mystère du melon de Montréal enfin résolu?» La Presse, 8 juin 2024. 
    Clémence Ménard, « Vers un possible retour du melon de Montréal? »  Ville en vert, 1 septembre 2021. ↩︎
  8. Daphné Cameron, « Le mystère du melon de Montréal enfin résolu? »  La Presse, 8 juin 2024. ↩︎
  9. « Le projet ‘agriculturel’ de la maison Hurtubise. »  hcq-chq.org
    https://hcq-chq.org/le-projet-agriculturel-de-la-maison-hurtubise/ ↩︎